Les dimensions de la conscience
Dr. Jean-Pierre Jourdan -
Article
publié dans les Cahiers de IANDS-France, Hors série
scientifique N°2, janvier 2001.
Les Expériences de mort imminente se sont toujours
heurtées à la logique rationnelle qui est à
la base de la recherche scientifique, car nos concepts habituels
sont manifestement insuffisants et inadaptés pour comprendre
ces expériences dans leur intégralité.
Doit on pour autant les considérer comme indignes d'une
recherche sérieuse, pour la simple raison qu'elles
ne sont pas compatibles avec notre toute provisoire vision
du monde ?
Notre connaissance des lois de la nature a souvent avancé
grâce à certains faits qui défiaient le
bon sens et ne trouvaient pas d'explication dans le cadre
scientifique de l'époque. La cohorte d'étrangetés
qui accompagne les récits d'EMI ainsi que leur propension
à échapper à toute logique les rendent
tout à fait dignes d'entrer dans cette catégorie.
Si ces témoignages, après une étude
approfondie, sont établis et restent inexplicables
par les lois connues du moment (ce qui me semble être
le cas), une démarche scientifique doit donc conduire
à émettre des hypothèses, lesquelles
peuvent déboucher sur la découverte de nouvelles
lois, ou sur une extension de celles qui sont connues. Pour
être validées, ces hypothèses devront
ensuite être confrontées à la réalité,
et donc aux faits dont elles sont supposées rendre
compte.
Je vais donc tenter de contribuer à cette réflexion,
en détaillant l'hypothèse que j'ai présentée
dans le dernier numéro de ces Cahiers, et en la confrontant
aux témoignages dont je dispose.
Loin de contredire les lois de la nature que nous connaissons,
la thèse que je propose devrait les prolonger et les
replacer dans une perspective élargie. Nous verrons
comment ce concept est capable de donner une vue cohérente
des Expériences de Mort Imminente (et d'autres expériences
similaires), permettant ensuite d'émettre une nouvelle
hypothèse sur les rapports entre conscience et matière.
UN TÉMOIGNAGE CAPITAL
Tous les témoignages ou extraits que vous lirez plus
loin ont été recueillis par IANDS-France, tous
sauf le récit suivant. Il est en effet exceptionnel
sur un point capital que je vous laisse découvrir.
« J'ai entendu un bruit mécanique.. Ca m'a fait
penser à la fraise du dentiste. C'était comme
si le bruit me poussait, et finalement je suis sortie par
le haut de ma tête. Dans cet état, j'avais une
vision extrêmement claire de la situation. J'ai remarqué
que mon médecin avait un instrument dans la main qui
ressemblait à une brosse à dents électrique.
Il y avait un emplacement en haut, ça ressemblait à
l'endroit où on met l'embout. Mais quand je l'ai vu,
il n'y avait pas d'embout. J'ai regardé vers le bas
et j'ai vu une boite. Elle m'a fait penser à la boite
à outils de mon père quand j'étais enfant.
C'est là qu'il rangeait ses clés à douilles.
A peu près au moment où j'ai vu l'instrument,
j'ai entendu une voix de femme, je crois que c'était
la voix de ma cardiologue. Et la voix disait que mes
veines étaient trop étroites pour évacuer
le sang.. et le chirurgien lui a dit d'utiliser les deux côtés.»
«Je ne suis pas restée là plus longtemps,
j'ai soudain senti une présence, et quand je me suis
retournée, j'ai vu un minuscule point lumineux. Il
semblait très très éloigné. Et
quand je m'en suis approchée, j'ai entendu ma grand
mère m'appeler. Je suis aussitôt allée
vers elle, et elle m'a gardée tout près d'elle.
Et plus je me rapprochais de la lumière plus je commençais
à voir des gens que je reconnaissais. J'étais
impressionnée par le fait que ces gens avaient l'air
merveilleux. Ma grand-mère n'avait pas l'apparence
d'une vieille femme. Elle était radieuse. Tout le monde
avait l'air jeune, sain, fort. Je dirais volontiers qu'ils
étaient de la lumière, comme s'ils portaient
des vêtements de lumière, ou comme s'ils étaient
faits de lumière. Je n'ai pas été autorisée
à aller très loin, ils me gardaient près
d'eux. Je voulais en savoir plus sur la musique, sur le bruit
d'une chute d'eau, sur les chants d'oiseaux que j'entendais,
et savoir pourquoi ils ne me laissaient pas aller plus loin.
Ils ont communiqué avec moi. Je n'ai pas d'autres mots
pour exprimer cela, car ils ne parlaient pas comme vous et
moi. Ils pensaient et j'entendais. Ils ne voulaient pas que
j'entre dans la lumière, ils disaient que si j'allais
trop loin ils ne pourraient plus me relier à mon moi
physique. Puis mon oncle m'a ramené en bas, à
travers le tunnel. Pendant tout le voyage j'ai intensément
désiré retourner dans mon corps. Cette idée
ne me posait pas de problème ; je désirais revenir
vers ma famille. Puis je suis arrivée à mon
corps, et je l'ai regardé, et franchement, il avait
l'air d'une épave. Il avait l'air de ce qu'il était
: mort. Et je n'ai plus voulu y retourner. Mon oncle m'a communiqué
que c'était comme sauter dans une piscine. Vas-y, saute
dans la piscine !.. J'étais toujours réticente
à le faire, et puis il s'est passé quelque chose
que je ne comprends toujours pas aujourd'hui. Il a accéléré
mon retour dans le corps, en me donnant une sorte de coup.
Comme quand on pousse quelqu'un dans la piscine. Et quand
j'ai touché le corps, c'était comme un bassin
d'eau glacée, et je n'oublierai jamais, mon corps a
fait comme ça..(elle a un sursaut) »
Tout à fait classique, me direz vous' Ce témoignage
a été recueilli par le Dr Michael Sabom,
cardiologue aux Etats Unis(Sabom 1998) connu pour avoir été,
à l'origine, tout à fait sceptique sur la réalité
des EMI. Ce n'est qu'après avoir recueilli et étudié
nombre de cas dans son service qu'il a changé d'avis
et publié (Sabom 1983) un ouvrage très documenté.
L'intervention subie par Pam Reynolds a eu lieu dans le service
de neurochirurgie, à l'hôpital de Phoenix, Arizona,
en 1991. Il s'agissait de l'ablation d'un anévrysme
cérébral géant, situé à
la base du cerveau.
Sur six heures au total, l'intervention proprement dite, au
niveau de l'anévrysme, dure une demi heure. Mais durant
tout ce laps de temps, pas une goutte de sang ne doit circuler
dans le cerveau car la moindre pression sanguine à
l'intérieur de l'anévrysme pourrait conduire
à la catastrophe. Malheureusement, ce dernier ne supporte
pas d'être privé d'oxygène plus de quelques
minutes. La solution : placer le cerveau en hypothermie, à
15,5°C, puis le vider de son sang.
Durant une telle intervention, tout est enregistré.
L'activité du cerveau est surveillée (on enregistre
l'EEG), de même que ce qui se passe dans le tronc cérébral
(qu'on surveille au moyen des potentiels évoqués
auditifs).
Dans ce témoignage, nous disposons tout d'abord de
deux éléments précis qui démontrent
une acquisition d'information objective et vérifiée
:
-
Ce qu'a vu Pam Reynolds durant son EMI, c'est la scie à
trépaner que tenait le chirurgien, ainsi que la boite
contenant ses accessoires. Or une scie à trépaner
(le Dr Sabom avoue lui même qu'en tant que cardiologue,
il ne savait pas à quoi elle pouvait ressembler)
fait vraiment penser à une brosse à dents
électrique, et la boite d'accessoires est tout à
fait semblable à une boite à outils peinte
en blanc.
-
Le dialogue entre chirurgien et cardiologue que la patiente
dit avoir perçu a effectivement eu lieu, le rapport
enregistré de l'intervention a permis de le vérifier.
Venons en maintenant au point qui en fait un témoignage
exceptionnellement intéressant : la confrontation entre
le récit de la patiente et les enregistrements de l'intervention
permet en effet de situer dans le temps le moment précis
où s'est déroulée son expérience.
A cet instant, les enregistrements détaillés montrent
que le corps et le cerveau étaient vidés de leur
sang afin de pouvoir aborder l'anévrysme sans risque.
Mais laissons parler le Dr.Sabom :
«Nous avons les enregistrements
médicaux du moment ou cette NDE s'est produite, c'est
l'une des premières fois que ça arrive. Nous pouvons
étudier l'activité EEG. Nous pouvons aussi étudier
tout ce qui s'est passé dans le corps physique au moment
où nous savons que cette expérience s'est produite.
Cela nous permet de répondre à des questions telles
que : « La NDE est-elle déclenchée par une
crise du lobe temporal, ou par une certaine activité
électrique dans le cerveau ? » Eh bien la
réponse est non , car les ondes cérébrales
étaient plates et le tronc cérébral inactif
au moment précis où cette expérience avait
lieu.»
Il est donc évident et irréfutable que toutes
les activités du cerveau (aussi bien les activités
de base que les fonctions supérieures) avaient cessé
à ce moment là, et il est clair que la conscience
que Pam a eu de son expérience, les perceptions qu'elle
a eu de son environnement, ainsi que celles du dialogue entre
le chirurgien et la cardiologue ne peuvent être le résultat
d'une quelconque activité cérébrale.
Dans la vie de tous les jours, notre état de conscience
est étroitement corrélé au fonctionnement
du cerveau. Les perceptions qui nous relient au monde extérieur
sont concentrées et traitées par ce dernier, l'attention
que nous leur prêtons ainsi que nos capacités intellectuelles
varient avec notre état d'éveil ou de fatigue,
avec notre état émotionnel, avec aussi tout ce
qui peut perturber notre matière grise (il suffit de
boire un verre de trop pour s'en rendre compte !). Il est donc
normal que l'on ait toujours cherché la conscience dans
le cerveau, puisque le fonctionnement de ce dernier semble conditionner
de façon linéaire l'état de la première.
Mais les EMI posent un problème qui défie le bon
sens : dans certains cas, alors que le cerveau ne fonctionne
plus, il semble que, malgré tout, la conscience
puisse persister. Nous venons d'en voir un exemple non équivoque.
QU'EST-CE QUE LA CONSCIENCE?
Ah, la conscience' Les scientifiques et les philosophes en débattent
depuis des siècles, de manière parfois plus polémique
que rationnelle, ce qui donne une idée de l'importance
du sujet. Nous ne savons pas grand chose sur sa nature. Est-elle,
comme le pense David Chalmers (Chalmers 1995) une caractéristique
fondamentale, irréductible à quoi que ce soit
de plus élémentaire, ou au contraire est elle
une propriété émergente d'une somme de
sous systèmes représentée par les diverses
fonctions cérébrales, comme le pensent d'autres
scientifiques ?
Nous allons voir que les EMI représentent une occasion
unique d'en savoir un peu plus sur elle. Et ce sont peut-être
ses comportements les plus étranges qui vont nous en
donner les clés.
Les témoignages d'EMI survenues lors de comas ou d'arrêts
cardio-circulatoires, le fait que des expériences tout
à fait similaires aient pu se produire dans des conditions
de fonctionnement cérébral allant d'un état
de conscience tout à fait normal jusqu'au coma profond
en passant par l'intoxication par des drogues diverses, thérapeutiques
ou « récréatives », laissaient penser
que ces expériences étaient manifestement indépendantes
du fonctionnement cérébral (Jourdan 2000). Il
y avait pour cela un faisceau d'indices indiscutables. Mais
le témoignage que nous venons de voir nous en donne tout
simplement la preuve irréfutable.
Cette question étant pour l'instant résolue, quelles
sont donc les caractéristiques tirées des témoignages
d'EMI que nous devrons prendre en compte pour comprendre cette
sacrée conscience ?
L'étude d'innombrables témoignages d'EMI, dont
nous verrons plus loin quelques exemples, permet d'en dégager
quelques unes :
-
La conscience semble dans certaines circonstances pouvoir
persister indépendamment de l'état fonctionnel
du cerveau.
-
Elle est apparemment, lors de ces expériences, capable
de percevoir (manifestement d'une façon inhabituelle,
nous le verrons plus loin) sans le secours des organes des
sens.
-
Ces
perceptions ne sont manifestement limitées ni par
l'espace, ni par le temps ; elles ne proviennent pas non
plus d'un point précis correspondant à un
organe sensoriel (ce qui nous donne en temps normal l'impression
que la conscience se situe quelque part entre nos deux oreilles)
: lors d'une EMI la conscience est non locale .
-
Elle est aussi capable de mémoriser (comment ?) alors
que le cerveau n'y est manifestement pour rien.
La
conscience, quand elle en a l'occasion, se comporte donc de
manière étrange et nous allons voir qu'elle semble
se jouer de toutes les lois de notre univers. Mais si
nos concepts et nos connaissances actuels ne peuvent donner
d'explication à cela, alors ce sont précisément
ces bizarreries qui doivent nous faire découvrir de nouvelles
lois!
UNE CINQUIÈME DIMENSION?
C'est donc la recherche d'un cadre dans lequel ces étrangetés
deviendraient « normales » et cohérentes
qui m'a conduit à formuler un concept nouveau que j'ai
proposé et résumé (Jourdan 2000) dans le
dernier numéro de ces Cahiers Scientifiques. Cette hypothèse
est la suivante :
Lors d'une EMI, tout se passe comme si notre univers comportait
non pas quatre dimensions mais au moins cinq. La conscience
évoluerait alors dans une dimension non seulement différente
de nos quatre dimensions habituelles, mais encore hiérarchiquement
« au dessus » de ces dimensions. En effet, cette
hypothétique cinquième dimension devrait englober
notre continuum spatio-temporel de la même manière
qu'un volume, défini par trois dimensions, englobe un
plan qui n'en comprend que deux.
Petite analogie: Un avion qui évolue en altitude (dans
la troisième dimension) n'a plus de lien avec le sol
(plan à deux dimensions), mais il n'a pas disparu pour
autant. Ses occupants n'ont effectivement aucun moyen d'action
sur le sol, mais ils peuvent voir ce qui s'y passe, et ce bien
mieux que ceux qui sont restés en bas !
Nous allons donc développer cela en détail, tout
en faisant faire un peu de gymnastique à nos neurones..
Essayons donc d'imaginer ce que pourrait bien devenir notre
univers à quatre dimensions (trois d'espace plus une
de temps) quand on le découvre depuis une cinquième
qui l'englobe (et pourquoi pas le transcende') : ce n'est pas
vraiment facile à concevoir d'emblée'
Nous allons donc procéder par analogie, en nous mettant
à la place d'êtres vivant dans un monde à
deux dimensions (grosso modo, un plan), et en imaginant ce qu'impliquerait
pour eux une incursion dans la troisième dimension. Le
jeu consistera ensuite à essayer de transposer ce passage
de la dimension N à la dimension N+1, en l'appliquant
à notre univers à quatre dimensions.
LES AVENTURES DE DÉDÉ DANS LA TROISIÈME
DIMENSION
Pour nous, cette troisième dimension est tout simplement
la hauteur ou l'altitude, mais comprenons bien que des êtres
vivant dans un plan n'en ont aucune idée, le concept
même de hauteur leur est étranger. Dans leur univers,
les objets et les êtres ont une certaine longueur et une
certaine largeur, donc une certaine surface, mais l'épaisseur,
la hauteur n'existent pas, pas plus donc que la notion de volume.
Pour simplifier, nous allons imaginer une feuille de papier
infiniment mince, et nous mettre dans la peau d'un être
habitant ce plan.
Imaginons pour commencer notre être bidimensionnel ( 2D,
DD, appelons le Dédé, allez !) rencontrant ce
qui pour nous au premier coup d''il se révèle
un simple triangle. Comprenons bien que pour lui il est opaque,
c'est à dire que si de notre point de vue humain nous
percevons en même temps ses trois segments, Dédé,
lui, ne pourra en voir simultanément que deux côtés
au maximum, et ce uniquement par la tranche. En effet, son point
de vue se situe dans le même plan que le triangle, et
pour l'instant il ne dispose d'aucun moyen de le voir depuis
une quelconque hauteur, étant par définition limité
à ce monde/plan à deux dimensions. Pour se rendre
compte de la forme de la figure qu'il vient de rencontrer, il
devra en faire le tour. De même pour nous, un objet solide,
en trois dimensions donc, aura toujours une face cachée,
et pour en connaître l'intégralité nous
sommes de même obligés d'en faire le tour.
Imaginons donc (il ne vous est pas interdit de faire un petit
dessin) qu'il aborde le triangle face à sa base, que
nous appellerons BC, le point A étant le sommet opposé
qu'il ne peut donc voir. De son point de vue, il voit donc un
segment (BC) et rien d'autre. S'il fait le tour, il verra successivement
les segments CA, puis AB, puis à nouveau BC.
Imaginons maintenant que le Pr. Zorglub Platzynski, savant bidimensionnel
mais néanmoins fou ait inventé le moyen d'accéder
à la troisième dimension. Notre courageux héros
accepte de tenter l'expérience qui va lui permettre d'atteindre
cette dimension, perpendiculaire donc au plan qui est son monde
habituel' Prudent, le professeur ne l'envoie pour commencer
qu'à un millimètre au dessus de leur plan/univers.
C'est peu, mais l'effet est surprenant : Dédé
a maintenant la possibilité d'apercevoir, juste en arrière
du segment BC qui auparavant lui bouchait la vue, le point A
ainsi que les deux autres segments constituant le triangle..
La base du triangle occupe toujours la majeure partie de son
champ de vision, mais, juste derrière, il a un aperçu
très aplati du reste de la figure. Cependant, n'oublions
pas que le système nerveux de notre Dédé
est prévu pour intégrer des informations visuelles
dans son monde en deux dimensions : il ne peut concevoir que
des structures ou des objets infiniment plats, et ne peut les
voir que par la tranche. Si dans ce monde peuvent exister des
objets dont les limites ne sont pas totalement opaques, il peut
avoir une notion de transparence, mais aucune notion de perspective
en trois dimensions. De fait, son système perceptif n'a
qu'une façon d'interpréter tout cela sans surchauffe
excessive : Dédé a tout simplement l'impression
de voir les segments AC et AB, ainsi que l'intérieur
du triangle par transparence !
De notre coté, dans nos trois dimensions d'espace, si
nous voulons voir un objet sous toutes les coutures simultanément,
il est nécessaire que cet objet présente une certaine
transparence.. Mais si, comme Dédé, notre conscience
pouvait avoir accès à une dimension de plus ?
Nous verrons plus loin quelques témoignages concernant
les premiers stades d'une NDE, durant lequel cette impression
que les personnages ou les objets observés sont transparents
est monnaie courante..
Le Pr. Platzynski s'enhardit et décide de pousser un
peu plus l'expérience : Imaginons maintenant que le déplacement
du point de vue de Dédé (qui se demande s'il hallucine
!) soit, dans la troisième dimension, de l'ordre de grandeur
de la dimension du triangle.. Plus question d'interpréter
cela comme un effet de transparence. Il « voit »
pour la première fois de sa vie un triangle dans sa totalité,
et ce d'un seul coup d''il.. Comment va t-il rendre cette impression
si on lui demande un dessin ? N'oublions pas que si nous, qui
vivons dans un monde à trois dimensions d'espace, pouvons
dessiner sur des feuilles ou des écrans qui sont des
plans, Dédé vit, lui, dans un monde à deux
dimensions, et ne peut dessiner que sur une droite. Eh bien
il va tout simplement faire plusieurs dessins du triangle, avec
des vues de devant, de derrière, des côtés
etc.., en expliquant que c'est ce qu'il a vu, mais simultanément
! Pour lui qui a l'habitude de se trouver d'un seul côté
du triangle à la fois, cette « vue » ne peut
être traduite que d'une seule façon : l'impression
de s'être trouvé partout à la fois par rapport
à l'objet de son attention. Et le bon Docteur Flatbug,
à qui il raconte son histoire quelque temps plus tard,
commence alors à se gratter ce qui lui sert de tête'
TOUT S'EXPLIQUE!
Si l'on fait abstraction de la difficulté qu'il peut
y avoir à intégrer des perceptions inhabituelles
à ce point, et surtout à les restituer avec des
mots et des concepts inadaptés, il me semble en fait
que les différents types de perception que l'on rencontre
dans les témoignages d'EMI deviennent clairs dans ce
nouveau cadre:
-
Si le déplacement dans la 5ème dimension est
très faible, la personne va rapporter avoir eu l'impression
d'observer une scène par transparence, voyant l'intérieur
des objets, ainsi que les faces habituellement cachées
et ce qui se trouve derrière. L'impression de voir
à travers les murs et le plafond est de fait courante
dans ces expériences.
-
Si le déplacement est plus important, nous retrouverons
cette notion de voir une scène (ou son propre corps)
à la fois de devant, de derrière, de dessus,
de dessous et des deux profils. Cette impression est très
difficile à rendre, ce qui explique peut-être
que de tels témoignages soient relativement rares.
En fait, tout se passe comme si les perceptions provenaient
simultanément de tous les points d'une sphère
englobant la scène.
En
effet, s'il est difficile d'un point de vue tridimensionnel
de se représenter une dimension spatiale supplémentaire,
on peut avoir recours à une analogie qui fonctionne parfaitement
au moins sur le plan perceptif : Rappelez vous que chaque dimension
surajoutée au sein d'une hiérarchie est par définition
simultanément perpendiculaire à toutes celles
qu'elle englobe. Dans notre exemple, la hauteur est perpendiculaire
à la fois à la longueur et à la largeur
du plan qu'elle « domine », et pour imaginer ce
que serait la vue « d'en haut », notre Dédé
pourra imaginer voir le triangle dont nous parlions plus haut
depuis tous les points d'un cercle englobant cette figure. Et
ça marche ! Si vous dessinez un repère fait de
deux droites perpendiculaires (la longueur et la largeur), un
cercle centré sur leur intersection sera bien simultanément
perpendiculaire aux deux droites. S'il peut concevoir une telle
perception, il comprendra que depuis la troisième dimension
on puisse voir simultanément toutes les faces du triangle.
Eh bien, c'est la même chose pour nous : il suffit (!)
d'imaginer une sphère englobant la scène observée,
et de considérer que la conscience qui perçoit
est présente simultanément en chaque point de
cette sphère. Cette dernière, considérée
dans sa totalité, est bien perpendiculaire aux trois
dimensions de notre espace habituel.
Confrontons maintenant cette hypothèse à la réalité,
c'est à dire aux témoignages:
-
«Mais
les yeux de l'âme voient ce qui est inaccessible au
commun des mortels. Je contemplais mon enveloppe charnelle
sous tous les angles à la fois : de face, de dos,
et des deux profils. Je découvrais grâce à
cette vision globale des aspects de mon physique que je
n'avais jamais discernés. Voilà probablement
pourquoi je ne m'étais pas immédiatement reconnue.»
-
«Ce
qui est quand même très important, c'est ce
qu'on ne peut pas faire d'ordinaire, c'est par exemple de
voir à la fois de l'intérieur, de l'extérieur,
cette impression presque de vue holographique' Pas une vue
panoramique, mais voir devant, derrière, tous les
détails simultanément, ça n'a rien
à voir avec la vue ordinaire, c'est très riche.»
(A.R.)
-
«Je
voyais à 360°, devant, derrière, en haut,
etc.. J'avais à la fois une vision globale
et une vision particulière. Je pouvais voir à
la fois de loin et de près, jusqu'aux fibres
du tissu qui recouvrait mon corps, je pourrais dire comment
les gens étaient habillés, je pouvais voir
le grès du mur, je voyais aussi les dalles du plancher
de la salle. Plus tard, j'ai pu vérifier leur présence
alors qu'il me semblait anormal et anachronique que l'on
puisse trouver des dalles dans une salle d'opération.
(') J'avais plusieurs axes de vision différents
en même temps ('). En même temps que je voyais
l'ensemble de la salle d'opération, j'ai pu voir
sous la table, donc simultanément depuis un autre
point de vue, une plaque verte avec des lettres blanches
qui portait l'inscription « Manufacture d'armes de
Saint Etienne ». Quand j'en ai parlé au chirurgien,
il m'a dit « on va aller vérifier ensemble
». Lui même n'était pas au courant de
l'existence de cette plaque, qui était bien à
l'endroit même et telle que je l'avais vue.
(') J'ai eu envie d'aller contre le mur, je ne sais pourquoi,
je me suis rendu compte qu'il ne me résistait pas
et je l'ai traversé. J'ai vu ce qu'il y avait de
l'autre côté : un immense jardin, un garage
à vélos, des voitures rangées, et je
me suis retrouvé complètement à l'extérieur.
(la première chose que j'ai faite en me réveillant
a été de demander à me lever pour regarder
par la fenêtre et vérifier la présence
du garage à vélos.) Quand j'ai fait cette
description au chirurgien, il s'est avéré
que tout était exact. J'ai aussi pu voir une salle
commune avec des gens qui dormaient, et surtout un couloir
où se trouvait un robinet, un point d'eau. Après
l'opération, lorsque j'ai été réveillé,
j'avais une soif terrible, mais on m'avait interdit de boire.
Je me suis levé, je savais que ce point d'eau se
trouvait deux portes plus loin .. Je suis sorti de ma chambre,
et je m'y suis rendu directement, je suis allé boire
à cet endroit que je savais être là
!» ( J.M.)
-
«Je
voyais à 360°, au travers des objets, etc'(')
Quand on passe d'un endroit à un autre en un clin
d''il, quand on voit simultanément plusieurs points
de vue de la même situation, «physiquement»
et temporellement, ce n'est pas du «quotidien».(D.R.)
-
«Je
me suis retrouvé en l'air ! Alors, je voyais tout,
j'entendais tout. Et alors là je me suis posé
la question. Je m'en rappelle. D'abord, j'ai regardé
toute cette activité. Puis, j'ai réalisé
qu'il y avait un corps. Je n'ai pas précisé,
mais quand je dis "en l'air", c 'est pas une vue à
deux-trois mètres sur un bloc. J'étais beaucoup
plus haut, beaucoup plus haut. J'avais une perception d'une
vue d'ensemble. Je n'étais pas à trois mètres.
C'était une vue globale, panoramique, dans la pièce.
Mais de très haut comme si j'avais pu voir à
travers le béton et en même temps ce n'est
pas la même chose. Je dirais plutôt que j'étais
dans une autre dimension de l'espace où alors que
j'avais une autre capacité de vision comme si j'étais
à la fois très loin et très proche
car je pouvais voir des détails très précis,
chaque détail.» (P.A)
-
«Je
voyais ce qui se passait autour, c'était dans une
tente de camping et donc c'était assez sombre. Je
suis très vite sortie de la tente mais ce qui est
très marrant, c'est que pour moi tout était
transparent. En fait je suis sortie, j'ai regardé
ces deux corps, et en même temps que je continuais
à les regarder, même si c'était très
rapide parce que je montais très rapidement, je voyais
à travers la tente de camping.» (P.S.)
Ces
témoignages parlent d'eux mêmes, et deviennent
logiques et cohérents au sein de ce concept de dimension
surnuméraire. L'impression de pouvoir se déplacer
instantanément, qui est à rapprocher de l'impression
de voir à la fois de loin et de près est elle
aussi normale : il ne s'agit en fait pas d'un déplacement
réel. Pas plus que vous n'avez à vous déplacer
pour explorer une photo, la conscience peut percevoir à
la fois la scène dans son ensemble, se focaliser sur
un détail et déplacer son attention en un instant
vers le coin opposé de la photo.
D'autre part, le témoignage de J.M. est particulièrement
intéressant : ce patient, qui n'avait jamais mis les
pieds à l'hôpital, y est entré dans le coma.
Il s'est réveillé dans sa chambre, ce qui ne l'empêche
pas de décrire avec précision une foule de détails
qui ont tous été vérifiés : ils
sont exacts.
Mais, pour l'instant, nous sommes demeurés (oui,
je sais..) dans une conception et des perceptions purement spatiales,
sans trop nous éloigner de notre univers habituel. (enfin,
quand même un peu !')
L'ESPACE, LE TEMPS ET DÉDÉ'
Pour comprendre ce qui va se passer quand la conscience va prendre
progressivement de la distance dans la cinquième dimension,
continuons notre séance de gym neuronale'
Vous lisez ce texte imprimé sur une feuille de papier,
c'est à dire sur un plan qui possède (approximativement,
puisque la feuille a une certaine épaisseur) deux dimensions.
Votre 'il se trouve donc à une certaine distance de cette
feuille, distance qui est mesurable sur l'axe d'une troisième
dimension perpendiculaire à son plan.
Ces trois dimensions d'espace ne suffisent pas à définir
notre univers, qui ne serait pas ce qu'il est (ou en tout cas
ne l'aurait pas été longtemps) s'il n'y en avait
une quatrième que tout le monde connaît : le temps.
Bien qu'étant d'un genre particulier (le genre temps
), il est une dimension comme les autres, et doit logiquement
être lui aussi « à angle droit » par
rapport à nos trois dimensions d'espace, ce qui, nous
l'avons vu, est assez difficile à se représenter
! Essayons pourtant :
Le point ou nous nous trouvons sur l'axe du temps est
l'instant présent. Tous les points d'un objet sont exactement
à la même distance temporelle de l'objet qu'il
était par exemple il y a une heure, soit 3600 secondes.
S'il n'en était pas ainsi, il y aurait un risque que
votre tête ne se déplace pas en même temps
que vos épaules (concept intéressant pour les
psychiatres ?), ou que le fond du verre dans lequel vous vous
versez à boire ait quelques secondes de retard, ce qui
risquerait d'avoir des effets pour le moins bizarres, sans parler
des frais de blanchisserie...
Quand vous déplacez la feuille que vous lisez, par exemple
en la rapprochant ou en l'éloignant de votre 'il,
tous les points de cette feuille se déplacent simultanément
dans une même direction, dont nous avons vu qu'elle est
l'axe d'une troisième dimension perpendiculaire à
la feuille. Eh bien quand le temps passe, tout ce qui appartient
aux trois dimensions d'espace se déplace de la même
façon sur l'axe du temps, à la même vitesse
et dans la même direction, c'est à dire du passé
vers l'avenir. Cet axe est donc bien perpendiculaire à
nos trois axes/dimensions d'espace.
Nos trois dimensions d'espace sont associées au temps,
définissant ce qu'on appelle un continuum spatio-temporel.
Pour un objet en mouvement (donc parcourant une dimension d'espace),
le temps passe (par rapport à un observateur immobile)
d'autant moins vite que sa vitesse augmente, et irait jusqu'à
suspendre son cours si sa vitesse atteignait celle de la lumière
(ce qui est a priori impossible car cela nécessiterait
une énergie infinie). Simultanément, et toujours
pour un observateur extérieur immobile, la dimension
de cet objet parallèle à l'axe de son déplacement
diminuerait jusqu'à devenir infiniment petite à
la vitesse de la lumière. L'espace et le temps sont donc
intimement liés, ce qui justifie l'emploi de termes comme
« continuum » ou « espace-temps ».
La cinquième dimension que nous sommes en train d'explorer
est elle aussi, par définition « perpendiculaire
» aux quatre dimensions de notre espace-temps. On peut
donc dire qu'elle les transcende, ce qui se traduit par le fait
suivant : pour un observateur situé dans cette cinquième
dimension, tout déplacement sur l' « axe »
de cette dimension est perpendiculaire à toutes les dimensions
de notre univers spatio-temporel.
De même qu'en prenant du recul par rapport à une
scène le regard peut en englober des portions de plus
en plus grandes, un observateur prenant du recul dans
la cinquième dimension va pouvoir percevoir non seulement
une portion de plus en plus grande d'espace (ce que nous prouvent
les témoignages exposés plus haut), mais aussi
une « tranche » de temps proportionnelle à
son éloignement.
Si vous grimpez au sommet d'une colline, votre regard pourra
embrasser un paysage d'autant plus étendu que vous serez
plus haut, car vous le voyez depuis un point élevé.
Imaginez maintenant que vous puissiez prendre de l' «
altitude » dans la cinquième dimension : votre
point de vue est extérieur aux quatre dimensions de notre
univers, ce sont donc ces quatre dimensions que vous voyez d'une
certaine distance. Or l'une de ces dimensions est le temps,
et ce dernier va lui aussi pouvoir être « vu »
en perspective, ce que l'on peut traduire en disant que, vu
de la cinquième dimension, le temps se « spatialise
», et devient donc une dimension comme une autre.
Comment cela va t-il se traduire pour les témoins ? On
peut supposer que dans de telles conditions la notion de temps
qui passe puisse effectivement disparaître ou devenir
pour le moins floue, ce qui explique qu'à la question
« avez vous conservé la notion du temps ? »,
la plupart répondent « non » ou « c'était
totalement différent ». La conscience étant
dans une dimension qui domine le temps, elle est évidemment
hors de celui-ci. Plus étrange encore, mais logique dans
ce cadre, nous pouvons trouver la perception anticipée
d'évènements qui ne se sont pas encore produits
:
-
«Le
" temps " n'apparaît plus comme fragmenté,
mais comme un seul et même moment : un " continuum
" lié à la volonté et au libre arbitre.»
(D.R.)
-
«Il
n'y avait aucune notion de temps, il ne comptait absolument
pas. Je ne saurais dire combien a duré l'expérience.
Par contre il y avait un délai entre le moment où
j'entendais les paroles et le moment où les
gens les prononçaient, comme un écho
inversé.» (J.M.)
Cet
exemple d'écho inversé me semble équivalent,
sur le plan temporel, aux bizarreries que nous avons étudiées
sur le plan spatial, c'est à dire la perception d'une
transparence ou l'impression de voir une scène sous plusieurs
angles simultanément. Il peut tout simplement être
dû à la perception simultanée de plusieurs
moments d'une même scène, et confirme un peu plus
la validité du concept de cinquième dimension.
LES RIVIÈRES DU TEMPS
Du haut d'une colline, vous pouvez tourner votre regard où
bon vous semble, suivre d'en haut le cours d'un chemin ou remonter
celui d'une rivière. Mais les chemins et les rivières
que la conscience « survole » lors d'une EMI possèdent
quatre dimension, dont une de temps (qui, nous l'avons vu, est
devenu une dimension quasi-spatiale).
De ce fait, d'autres composantes fréquentes des EMI vont
aussi naturellement trouver leur place dans ce cadre multidimensionnel
: il s'agit de tout ce qui touche à la possibilité
d'acquérir des informations sur des faits appartenant
soit au passé, soit parfois même au futur.
Dans cette catégorie, l'exemple le plus connu est la
revue de vie. S'agit-il seulement du retour à la conscience
de souvenirs très précis et complets, ou est-ce
tout autre chose ? Quand sont revécues certaines scènes
essentielles, c'est en effet avec une différence fondamentale
par rapport à un simple souvenir : le point de vue et
les émotions ressenties (ou plutôt revécues)
ne sont pas uniquement ceux de la personne qui vit l'expérience,
mais aussi ceux du ou des autres protagonistes. Nombre d'expérienceurs
ont aussi été frappés par le fait que les
tenants et aboutissants de leurs actions leur étaient
apparus clairement.
Je crois donc peu probable que les témoins soient
accueillis aux portes du paradis par une sorte de Saint Pierre
high-tech avec ordinateur portable et rétroprojecteur,
prêt à leur faire revoir vie et actions passées
à l'aide de diapositives ou de films aux formats Quick
time ou Real Audio' Il semble plutôt s'agir d'une promenade
(souvent guidée) lors de laquelle la vie qu'on a menée
dans notre univers est vue en perspective. En effet, les témoignages
comprennent parfois la vision d'une vie entière en un
instant (comme on peut voir un paysage dans son ensemble depuis
une colline ou une table d'orientation) , mais la visite est
le plus souvent agrémentée de zooms sur des moments
clés (comme on peut examiner des détails à
l'aide de jumelles ou, mieux, en descendant de la colline et
en se promenant sur les chemins de la vallée).
Certains témoignages portent aussi sur l'acquisition
(vérifiée) d'informations concernant le futur.
Celui qui suit, en plus de sa richesse sur le plan humain, semble
réunir les deux, avec en prime ce qui semble bien être
l'exploration de plusieurs possibilités concernant le
futur.
Chacune de nos actions est un carrefour aux multiples directions,
et il semble que, depuis cette dimension, l'on puisse en explorer
les différents embranchements. Tout cela a des implications
qui donnent le vertige : les conséquences de nos actes
sont elles de simples probabilités qui se réduisent,
« collapsent » à chaque action ou décision,
donnant un univers linéaire et unique, ou ce dernier
est il à chaque instant démultiplié en
uneinfinité d'univers correspondant chacun à une
variante selon la possibilité qui a été
actualisée ?? Allez, le Dr Flatbug va prendre un cachet
d'aspirine et un bon somnifère, il va se coucher gentiment
et demain il ira voir un copain psychiatre pour lui parler de
sa grosse fatigue'
«Quand je me suis retrouvée devant cette lumière
blanche, j'ai vu défiler mon passé, ma courte
vie, et là j'ai trouvé que c'était très
beau ; on n'est pas jugé, on comprend qu'on a un but
sur terre.»(I.F.)
«Alors que je suis aspiré, d'autres visions apparaissent.
Je revois des moments de mon enfance avec une précision
étonnante et en fait, deux épisodes sont restés
gravés dans ma mémoire. Le premier évoque
un court moment où mon comportement semble avoir blessé
un compagnon et le second, une action contraire qui semble avoir
procuré un réconfort à une autre personne.
Puis l'un et l'autre de ces épisodes se déroulent
simultanément, comme s'il s'agissait de les comparer
et d'évaluer la valeur et l'impact de mes comportements
dans chacun des cas. J'ai par ailleurs l'impression d'être
accompagné d'un guide, sans apparence visible mais dont
la présence est certaine et ressentie comme une lumière
chaleureuse et envahissante, une lumière de réconfort.
Il me conduit dans ce qui semble être le film de ma vie
et il met en valeur le sens de mes gestes, comme de mes intentions.
Ce qui rend ces visions si précises n'appartient pas
seulement à un phénomène purement visuel.
J'ai la certitude qu'au-delà des images qui défilent
à toute allure sous mes yeux, émerge aussi, et
d'une façon claire, un "sens", une "valeur" ; je "vois"
le sens et les valeurs. La clarté visuelle s'enrichit
alors d'une "clarté mentale" ou "morale" ; les événements
ne sont pas simplement évoqués comme des clichés
mais comme des leçons où se juxtapose "l'esprit",
dans un contexte qui semble universel et dont les dimensions
sont infinies. Il me semble alors que je prends conscience,
profondément, de ce qui constitue "mon libre arbitre"
et de l'impact de mes choix, à court et à long
terme. Dans les deux exemples évoqués, il m'était
permis de voir non seulement le résultat immédiat
de mes gestes, mais aussi leur impact futur ; les malheurs et
les difficultés qu'ils allaient engendrer, la paix qu'ils
pouvaient répandre.
'/' J'ai rencontré des amis d'enfance qui ressemblaient
à ce qu'ils étaient au moment où je les
ai connus, dans le sens où j'ai revécu (comme
observateur et comme participant) certaines situations, et les
intervenants de ces épisodes ressemblaient alors à
ce qu'ils étaient au moment de ces épisodes. Certains
personnages me sont apparus aussi «transformés»
par la conséquence de «mes gestes» et retransformés
par la «correction» des gestes précédents...
(') Au sujet d'un personnage en particulier, j'ai ressenti une
impression de regret et de tristesse. Cela est relatif à
un épisode que j'ai revu et dans lequel je bousculais
un ami; j'ai vu l'épisode selon son point de vue et le
mal que je lui avais fait et les transformations que j'avais
opérées inconsciemment sur sa vie, l'agressivité
qu'il allait développer, la peur aussi, qui le hanterait...
Bref, j'ai vu comment le mal causé à un autre
pouvait l'affecter. J'ai revu cette séquence aussi, mais
où cette fois, j'agissais avec considération,
compassion et sans violence à l'égard de cet enfant
et ce qui allait suivre... Et un tas de trucs du genre... L'essentiel
de cette expérience semblait graviter autour des notions
d'amour, de compassion, de bienveillance.»
('au sujet d'un ami présent au moment de l'expérience,
à qui il en a parlé plus tard): «Je lui
ai aussi parlé de " sa vie " (que j'avais eu l'impression
d'entrevoir un peu), de ses accomplissements et de " l'intention
qui devait les animer ".(') J'ai vu des gens que j'ai connus
enfant, j'ai vu un passage de la vie de mon ami-témoin
mais sans le contacter, tout ça dans divers lieux ; les
lieux changeaient selon les personnages ou selon les «émotions»
ou encore, les événements... Une partie des lieux
étaient des références à des lieux
réels mais comme entourés d'un autre espace...»
«Le "guide" (auquel je ne rattache aucune identification
particulière de type angélique, par exemple) était
très lumineux et très chaleureux, compréhensif
et clair, dans ses messages (des messages qui ne concernent
que moi) et ses évocations (de mon passé comme
de mon futur.)» (D.R.)
PERCEVOIR OU RESSENTIR
Mais nous pouvons maintenant aller plus loin. Il semble en effet
que ce que les témoins perçoivent et rapportent
de leur expérience ne soit pas limité à
l'espace et au temps, ni à un équivalent de nos
perceptions habituelles.
Beaucoup, en effet, rapportent avoir perçu non seulement
les pensées des protagonistes de la scène qu'ils
observaient, mais aussi leurs émotions : colère,
peur, anxiété, tristesse (sans parler de l'Amour,
avec un «A», omniprésent quand le témoin
s'approche un tant soit peu de la lumière). Mais comment
se fait cette perception ? En fait, je ne suis pas sûr
que ce dernier mot soit adéquat. Dans la vie courante,
les signes d'une émotion transparaissent sur un visage,
dans une attitude, un regard ou une intonation, mais les témoins
affirment en général (ce qui est très difficile
à expliquer et à retranscrire) que durant une
EMI ce n'est pas de cette manière là que les choses
se passent. Tous ceux que j'ai interrogés et qui ont
eu cette partie de l'expérience disent d'une façon
ou d'une autre avoir ressenti émotions ou pensées
comme si, à ce moment là, ils avaient été
en même temps eux même et l' « autre ».
Ils ne perçoivent pas, ils ressentent, s'identifient.
Pour certains, ce sont des scènes entières, plus
ou moins chargées émotionnellement, qui ont été
vécues selon deux points de vue simultanés.
« J'ai eu l'impression aussi d'une certaine perméabilité
à l'égard des émotions des autres, j'ai
ressenti la peur de mon père très vivement.
J'ai pu vérifier auprès de ma s'ur et de mon père
les impressions de sensations de leurs propres pensées
affectives que j'avais pu avoir lors de cette sortie : Le côté
extraordinairement introspectif et centré sur elle-même
de ma s'ur décorant un livre , la distraction de mon
père lisant, puis son inquiétude grandissante.
» (M.L.J.)
« Ensuite, la chose qui était vraiment surprenante
était que je pouvais « lire » dans les pensées
des gens..(') Il y a aussi une personne qui est tombée
dans les pommes, j'ai senti son malaise à l'avance et
su qu'elle allait s'évanouir avant qu'elle ne s'affaisse.
Vérification faite auprès du chirurgien, une infirmière
s'est bien évanouie lors de mon opération.
A un autre moment, j'ai ressenti avant qu'il ne l'exprime la
colère qui montait en lui quand on a donné au
chirurgien un instrument qui n'était pas le bon.
J'étais dans la conscience des gens, dans leur pensée,
dans leur colère. Je suis certain que j'aurais pu être
dans la pensée des autres de la même manière
si cela m'avait intéressé. » (J.M.)
« j'ai vu une sorte de halo entourer toutes les choses
que je regardais, j'ai aussi perçu certaines pensées
de mes amis. » (B.M.)
Souvenez vous, un peu plus haut :
"un épisode que j'ai revu et dans lequel je
bousculais un ami; j'ai vu l'épisode selon son point
de vue..." (D.R.)
Le témoignage suivant ne parle pas d'émotion,
il est une variante de cette impression d'identification à
l'autre. Cependant, il ne s'agit plus là d'être
identifié à un être humain, mais de savoir,
parce qu'on l'a été, ce que c'est que d'être
un arbre, un rocher' ou même des peintures rupestres !
Ce témoin (il fallait voir son hilarité quand
il m'a raconté la scène) a été pris
pour un confrère par une spécialiste de l'art
rupestre et de sa symbolique, parce que pendant un moment il
a été les peintures, il a été les
symboles et ce qu'ils représentaient, ce qui lui a permis
d'en parler d'égal à égal avec elle :
(') « Il y a eu une forêt' J'ai d'abord eu
une vue panoramique de la forêt, puis ensuite cette impression
d' « entrer » dans le détail des arbres,
jusqu'à la cellule, cette impression d'arriver à
l'intimité de l'arbre. C'est plus que visuel, c'est une
impression de.. personnification. Ca ne s'est pas passé
que pour les arbres, mais aussi pour les rochers, pour une simple
vitrine de magasin. C'est assez curieux, c'est une impression
de comprendre la matière, l'impression d'être les
deux à la fois, moi même et l'arbre, les rochers'
Par exemple, quand j'étais l'arbre, j'avais la notion
qu'autour de moi il y avait des espèces hostiles. Le
problème, sur le moment, c'est qu'on a une espèce
de connaissance totale. Tout semble évident donc il est
difficile d'être curieux'mais c'est ce qu'on en rapporte'
il faudrait pouvoir tout noter !
(') Je me suis trouvé dans une grotte. Elle n'était
pas éclairée, pourtant tout était clair,
parfaitement clair sans aucune lumière... C'était
la grotte des Trois Frères, je l'ai su après.
Ca s'est passé de la même façon que pour
les arbres ou les rochers, les symboles qui étaient sur
les parois et leur signification étaient évidents
pour moi, ils faisaient partie de moi. Plusieurs années
après, je suis allé à une conférence
où une spécialiste devait parler de la symbolique
des peintures rupestres. Je suis resté pour discuter
avec elle après sa conférence, elle m'a demandé
sur quel chantier je travaillais ! Comment lui expliquer que
je n'avais jamais mis les pieds dans une grotte, ni lu le moindre
livre là dessus ? » (A.R .)
UNE IMPRESSION DE CONNAISSANCE TOTALE
Jusqu'à présent, nos témoins ont exploré
leur environnement immédiat ou notre monde physique,
leur propre vie ou celle de leurs proches d'une façon
certes originale, mais néanmoins concevable. Nous allons
voir maintenant que dans certains cas cette exploration peut
aller beaucoup plus loin, confinant alors à une connaissance
totale, globale, allant parfois jusqu'à l'impression
de ne faire qu'un avec tout le savoir de l'univers ou, même,
d'être uni à ce dernier.
Pour un esprit cartésien, cette caractéristique
des EMI est elle aussi rigoureusement incompréhensible.
Pour apprendre un maximum de choses sur presque rien, nous sommes
obligés de passer des années sur des bancs d'école
puis de faculté, nous avons recours à des centaines
d'ouvrages qu'il faut lire et mémoriser un à un,
et voilà que des personnes dont le cerveau était
manifestement hors d'état de fonctionner viennent vous
dire que, l'espace d'un instant, ils ont eu accès à
toute la connaissance de l'univers !
Une fois de plus, notre concept multidimensionnel va nous aider
à comprendre : si le recul dans notre dimension supplémentaire
est suffisant, la quantité d'informations perçue
a toutes les chances de devenir proprement phénoménale,
puisqu'elle ne concernera plus seulement une scène limitée,
mais permettra une vision « instantanée »
d'un domaine d'espace et de temps proportionnel à ce
déplacement, pouvant donc devenir pratiquement infini.
On peut raisonnablement supposer que notre cerveau, qui n'est
pas fait pour cela, aura beaucoup de difficultés à
intégrer de telles perceptions, mais certains témoignages
sont parfaitement clairs :
«Tout paraît uni dans une harmonie prodigieuse
des sens et de l'esprit. La beauté, la précision
et la splendeur de ces visions participent de la " compréhension
globale " de tout et du tout... Cela s'exprime difficilement
avec des mots proposés par la raison ! » (D.R.)
«J'ai vu les scènes de la vie de notre monde
avec une perception globale et en faisant un bilan global également.
» (R.S.)
« Mise à part ce flux d'information auquel j'avais
accès - ou plutôt devrais-je dire qui m'a été
révélé - trop vite, par tranches et à
une vitesse folle, une connaissance trop importante pour que
mon misérable cerveau puisse analyser et retenir
toutes ces informations, je n'avais pas seulement accès
à ces informations mais j'étais ces informations,
ce grand tout, un peu à l'instar du fonctionnement de
l'hologramme pour lequel dans chaque petite partie de l'image
3D est contenue l'image en totalité et ce sentiment que
rien n'était, n'est, et ne sera au dessus de quelque
chose d'ineffable que je nommerai DIEU. Il m'aurait fallu des
années pour écrire tout cela, c'était incommensurable,
inimaginable, en quelques secondes a défilé devant
moi l'histoire de l'univers. Il est inimaginable qu'une machine
puisse emmagasiner toutes ces connaissances enfouies. J'avais
l'impression de tout savoir sur tout, j'étais remonté
à la source du savoir ; et savoir que la connaissance
universelle est en toutes choses, qu'elle peut être connue
par tous.(') Je pense que le temps se déroulait à
une autre vitesse, car le flux d'informations que j'ai pu entrevoir
était gigantesque en contenu et dévoilé
dans un temps très court. En revanche après mon
retour il paraissait se dérouler normalement. »
(B.M.)
Reprenons contact avec notre héros bidimensionnel, et
imaginons le explorant un univers un peu plus complexe qu'une
feuille de papier sur laquelle est dessinée une simple
figure géométrique. Il se trouve maintenant dans
ce qui est pour nous une simple photographie. Imaginez un peu
le temps que va lui prendre l'exploration de cette dernière,
puisque nous savons qu'il n'a aucun recul ! Tant qu'il n'en
aura pas exploré chaque point, mémorisé
la couleur et l'emplacement de chacun, il ne saura pas si la
photo représente sa belle-mère ou un coucher de
soleil, alors que pour vous le simple fait de vous trouver à
une certaine distance dans une troisième dimension vous
permet d'en voir l'ensemble instantanément. Souvenez
vous des progrès et des découvertes permises à
l'archéologie par la photographie aérienne' De
même, si Dédé se trouve dans une page dactylographiée,
il lui faudra faire le tour de chaque lettre, une par une, pour
les identifier, les regrouper en mots puis en phrases pour enfin
avoir une idée de la signification du texte. Comprenons
bien que si nous avions le nez sur la page, nous n'en verrions
guère plus que lui ! Nous pouvons donc en conclure que
plus la distance prise dans la dimension N+1 (la hauteur pour
Dédé, la cinquième pour nous) est grande
plus l'information accessible dans les N dimensions (les deux
dimensions de la feuille de papier où vit Dédé,
pour nous les quatre de notre univers) qu'elle englobe est importante.
Qui plus est, cette acquisition d'information est quasiment
instantanée.
L'impression d'avoir eu accès à un savoir
total, de façon non séquentielle mais globale
est exactement celle que Dédé décrit au
Dr. Flatbug après s'être trouvé miraculeusement
transporté dans la troisième dimension, c'est
à dire à la hauteur de nos yeux : il a pu voir
l'ensemble de la photo d'un seul coup d''il, ce qui, pour lui
est totalement fabuleux, mais aussi un peu difficile à
faire admettre à ses contemporains.. en particulier au
Dr. Flatbug, qui hésite : va t-il hospitaliser notre
ami en psychiatrie pour délire mystique caractérisé
ou va t-il se servir un verre de whisky pour faire descendre
un tube d'anxiolytiques ?
TOUT SE PASSE COMME SI
Tous les éléments que nous avons réunis
et analysés nous permettent d'avoir une idée plus
précise de la façon dont se comporte la conscience,
quand apparemment elle n'est plus « branchée »
sur un cerveau. Nous disposons donc maintenant d'un cadre cohérent
et non réducteur (une cinquième dimension, ça
donne plutôt du large!) qui permet à chaque pièce
du puzzle de trouver sa place.
Tout ce que nous vivons et accomplissons journellement paraîtrait
non seulement bizarre mais certainement incompréhensible
et impensable à un être vivant dans un univers
qui ne comprendrait que deux dimensions d'espace. Nous venons
de voir que des témoignages apparemment irrationnels
sont en fait logiques si l'on considère qu'ils sont vécus
depuis une dimension supplémentaire.
Toutes leurs caractéristiques montrent que la conscience,
dans ce cadre, est indubitablement non-locale. Elle n'est localisable
ni dans le cerveau, puisque indépendante de son fonctionnement,
ni manifestement dans le cadre de notre univers habituel, dont
elle se joue des limites spatiales et temporelles. A la lumière
de la thèse que je propose, il est clair qu'en fait la
conscience n'est probablement pas plus localisée quelque
part dans notre univers ou dans notre cerveau que vous n'êtes
quelque part dans votre ombre.
ET LA PERCEPTION?
Il reste une question que l'on est en droit de se poser au vu
de tels récits : comment la conscience peut-elle percevoir
quoi que ce soit lors de ces expériences, alors qu'elle
ne dispose plus d'organes sensoriels ni d'un cerveau pour traiter
les informations ? Si tout ce matériel biologique était
indispensable et que nous ayons néanmoins admis que la
conscience puisse dans certaines circonstances en être
indépendante, on pourrait peut-être, à la
rigueur, concevoir cette dernière comme pure, immatérielle,
plongée dans une sorte d'éternelle introspection
et se contentant d'être présente à elle
même, car sourde et aveugle.
Mais les rapports d'EMI fourmillent de perceptions diverses
qui ne semblent limitées par rien, transcendant l'espace,
le temps, dépassant même nos possibilités
pourtant relativement perfectionnées d'acquérir
une certaine connaissance.
Les quelques extraits que vous venez de lire sont à mon
avis capitaux pour la compréhension de ce phénomène.
Nous pouvons en effet déduire de ces observations un
nouveau concept, très simple au bout du compte quoique
peu familier :
La conscience est apparemment capable d' « être
» intimement, et donc de connaître « de l'intérieur
» tout ce qui est l'objet de son attention. Elle
n'observe pas quelque chose d'extérieur, elle est, d'une
manière ou d'une autre, ce quelque chose.
Tout se passe comme si elle percevait non pas à l'aide
d'organes sensoriels mais par un phénomène d'identification.
Il semble qu'il lui soit possible de percevoir de cette manière
a peu près n'importe quoi : matière inerte, comme
des rochers ou une vitrine, matière biologique mais dépourvue
de système nerveux ou d'intelligence (une forêt,
les arbres), êtres humains (réputés, eux,
pourvus d'intelligence), mais aussi émotions et pensées
; elle est capable de percevoir des significations symboliques
(par exemple celles de peintures rupestres) ou, plus abstrait
encore, de la connaissance pure.
UNE DERNIÈRE HYPOTHÈSE
Peut on en l'occurrence parler d'interaction entre conscience
et matière, ou entre conscience et cerveau ? Je ne sais
si nous disposons des concepts qui nous permettraient de comprendre
ce qui se passe entre la conscience et l'objet de son attention.
Tout ce que je crois pouvoir faire pour l'instant est d'émettre
une hypothèse, en partant de cette faculté d'identification
que nous avons mise en évidence :
En temps normal, tout se passe comme si la conscience était
parfaitement identifiée à un cerveau, percevant
donc toutes les nuances de son fonctionnement, les émotions,
les variations de l'état d'éveil, les perceptions
sensorielles, les pensées, etc.
On peut poursuivre ce raisonnement en supposant que quand l'état
fonctionnel du cerveau est suffisamment perturbé, la
conscience se retrouvant identifiée à un objet
inerte (aimeriez vous « être » du fromage
blanc ?) cesse d' « être » ce cerveau et recouvre
une certaine liberté, vivant alors ce que nous appelons
une EMI, le retour de l'expérience se produisant lorsque
celui ci redevient digne d'intérêt.
EN CONCLUSION
Le fait que ce concept de dimension supplémentaire
rende leur cohérence à pratiquement toutes les
bizarreries que nous avons passées en revue peut avoir
deux explications :
-
Soit les EMI sont le plus gigantesque canular de l'histoire,
les témoins s'étant donné le mot pour
que leurs expériences recèlent une cohérence
cachée, attendant que quelqu'un découvre et
révèle cette logique (et le complot !), ce
qui vient d'être fait'
-
Soit cette cohérence est la meilleure preuve de la
réalité des EMI, et, bien que l'on puisse
probablement envisager d'autres interprétations
pour rendre compte de la non-localité de la conscience,
elle peut être aussi un argument en faveur d'une conception
élargie de la topologie de l'univers.
Il
existe actuellement plusieurs théories de l'espace-temps
envisageant une ou plusieurs dimensions supplémentaires.
Ces hypothèses sont actuellement étudiée
par des scientifiques tout à fait sérieux (Greene
1999, Arkani-Hamed N., Dimopoulos S., Dvali G. 2000) qui, cherchant
à comprendre pourquoi l'interaction gravitationnelle
est si faible par rapport aux autres forces, n'hésitent
pas à envisager que notre espace tridimensionnel
soit englobé dans un univers de dimension supérieure.
Cette conception de dimensions supplémentaires n'a en
outre rien de révolutionnaire, puisqu'elle a été
envisagée dès 1884 par un ecclésiastique
anglais, Edwin Abbott, dans un petit livre intitulé Flatland.
UN DERNIER MOT
Jusqu'à présent, la démarche scientifique
n'a pris en compte les apparentes excentricités
rencontrées dans les témoignages d'EMI que pour
en déduire qu'il s'agissait d'hallucinations ou de phénomènes
psychologiques inhabituels. Le jeu consistait simplement à
rechercher quelles étaient les anomalies organiques du
fonctionnement cérébral ou les mécanismes
psychologiques qui pouvaient être à l'origine de
telles curiosités.
Curieusement, la composante transcendante ou mystique des EMI
est plus facilement acceptée car plus ou moins considérée
comme échappant au jugement de la science. De fait, il
est tout a fait possible pour un scientifique rationaliste pur
et dur de posséder une cloison étanche entre ses
convictions religieuses et ses certitudes scientifiques, ce
qui lui permet d'aller à la messe tous les dimanches
sans trop de conflits internes...
Pour ma part, je considère que cette dernière
phase (comprenant l'approche de la lumière, la rencontre
éventuelle d'un « guide », la présence
d'un Amour au dessus de tout ce que l'on connaît, la compréhension
d'un but à sa propre vie, la sensation d'un point de
non retour) est au delà du cadre que je viens de proposer.
Je pense que seuls ceux qui ont connu cette partie de l'expérience
peuvent en parler. Mais si l'on considère que la cohérence
des premières phases de l'expérience est maintenant
établie, il est plus que probable que cette partie des
EMI (la plus importante aux yeux des témoins, et la plus
lourde de conséquences sur leur vie) doive dorénavant
être vue avec des yeux neufs et un esprit ouvert.
J'espère enfin que la théorie que je viens d'exposer
en détail contribuera, en leur offrant un cadre cohérent,
à faciliter la compréhension des EMI et l'approche
de la conscience, et permettra à la communauté
scientifique d'admettre qu'elles sont le reflet d'une réalité
dont il faudra dorénavanttenir compte.
Dr. Jean-Pierre Jourdan
Bibliographie
-
Arkani-Hamed N., Dimopoulos S., Dvali G., Les dimensions
cachées de l'univers, Pour la science N° 276,
Octobre 2000.
-
Chalmers D., Absent Qualia, fading Qualia, dancing Qualia.
In Conscious experience, sous la direction de Thomas Metzinger,
Ferdinand Schöning 1995.
-
Greene B., The Elegant Universe : Superstrings, Hidden Dimensions,
and the quest for the Ultimate Theory, W.W. Norton, 1999.
-
Jourdan J.P., Juste une dimension de plus. Cahiers scientifiques
de IANDS-France. Hors Série N°1 Février
2000.
-
Sabom M.B., Souvenirs de la mort ; Robert Laffont 1983.
-
Sabom M.B., Light and Death : One doctor's fascinating account
of near-death experiences. Grand Rapids, MI ; Zondervan
1998.
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